Pas de repis pour la Ligue 2 ; après son match NUL de vendredi soir face au Tours FC, le RC Lens n’a pas le temps de tergiverser. La prochaine étape est régionale, puisque le match de lundi nous opposera aux Valenciennois, pour un derby plus qu’attendu pour bien des raisons. Qui de mieux que François Launay (@francoislaunay), journaliste pour 20 Minutes Lille, pour nous parler de ce match si important, aussi bien sur le plan comptable que pour la symbolique ? Interview.
BM : Salut François, tout d’abord merci de ta disponibilité ! Avant de commencer, étant donné que tu es un régional, peux-tu nous parler de ton rapport avec VA ?
François : C’est là-bas que j’ai découvert le foot, quand je suis allé au stade Nungesser pour la première fois à l’âge de 7 ans. J’ai donc forcément un attachement particulier à ce club. Après, dans mon travail, j’essaie d’être le plus objectif possible et c’est tout à fait normal. Pour résumer: Il y a le coeur en privé et la raison au niveau professionnel
BM : Peux-tu nous éclairer sur la forme actuelle du VAFC ? Comment se passe le début de saison dans le Hainaut ? On a l’impression que c’est inconstant – on passe rapidement du très bon au très moyen…
François : Au vu des résultats, on peut dire que VA réalise un très bon début de saison et qu’il n’était pas attendu dans le haut du tableau. Après, il faut nuancer. C’est une équipe bien plus à l’aise à l’extérieur (3 victoires en 4 matchs) qu’à domicile où elle n’a pas encore gagné depuis le début de saison (ça peut rassurer le RC Lens). C’est aussi une équipe qui aime contrer et qui a plus de mal à faire le jeu chez elle même si c’est une équipe joueuse. Beaucoup de jeunes ont été lancés ces derniers mois et du coup ça manque un peu d’expérience quand il faut gérer un résultat. Mais le niveau de jeu actuel est très intéressant avec beaucoup de jeu au sol demandé par l’entraîneur David Le Frapper qui connaît bien les gamins pour les avoir coachés quand il était en charge des moins de 19 ans avant de prendre la tête de l’équipe en février dernier.
BM : Parle nous de cette rivalité entre supporters des deux clubs, qui est somme toute assez étonnant puisque les clubs semblaient plutôt amis par le passé… Comme le perçois-tu ?
François : C’est dommage d’en être arrivé là car les supporters des deux camps ont longtemps eu des bonnes relations. Socialement, les deux camps se rapprochent avec une lourde histoire minière et beaucoup de difficultés sociales aujourd’hui. Mais les deux camps ont progressivement commencé à s’éloigner. Quand VA est tombé au plus bas dans les années 90, beaucoup de fans de VA sont allés supporter Lens. Et quand le club est revenu au plus haut niveau je sais que pas mal de fans ont reproché aux supporters lensois d’avoir toujours fait preuve de condescendance à leur égard alors que depuis 2007, on ne peut pas dire que Lens ait eu de meilleurs résultats que le VAFC.
Mais la goutte d’eau qui a fait déborder le vase est quand Jean-Raymond Legrand, alors président de Valenciennes FC, a refusé d’accueillir le Racing pendant les travaux de Bollaert. Cela a passablement énervé les Lensois surtout que le Racing avait aidé Valenciennes quand le club était en dépôt de bilan au milieu des années 90 en organisant un amical Lens-Sampdoria au stade Nungesser. La recette de ce match avait été intégralement reversé à VAFC. Gervais Martel, qui avait alors aidé le club, n’a pas compris qu’il n’y ait pas de renvoi d’ascenseur. Mais les dirigeants de VA, qui ont du mal à remplir leur stade, ne voulaient pas que Lens le fasse à leur place en attirant par la même occasion certains sponsors. D’où la polémique qui a suivi et qui perdure encore aujorud’hui.

La jeunesse de VAFC, emmenée par le médiatisé Angelo Fulgini, est-elle aussi exceptionnelle que ce que l’on entend dire ?
François : Je suis toujours prudent quand on parle de jeunesse exceptionnelle car le plus dur est ensuite de confirmer et les exemples de jeunes qui ont explosé en vol sont très fréquents dans le foot. Après, il faut reconnaître que Valenciennes, qui a toujours eu une histoire de club formateur, n’avait pas eu de tels talents depuis des lustres. Avec les problèmes économiques du club, les jeunes ont eu leur chance depuis al saison dernière et l’ont bien saisi. Les Fulgini mais aussi Slidja, Mbenza, Tameze, Ndao et Tousart (parti à Lyon en fin de mercato) sont de vrais talents et se connaissent par coeur puisqu’ils ont joué ensemble chez les jeunes. Reste à voir si ça va durer car quand le succès arrive, les gamins peuvent vite perdre la tête à cause d’entourages plus ou moins néfastes. Lens a aussi connu ça par le passé.
BM : 5,000 supporters lensois sont annoncés au Hainaut pour le Derby. Ces chiffres sont toujours difficile à comprendre, surtout au regard la crise qui touche le club depuis des années. De ton côté, comment analyses-tu cette fidélité irrationnelle – voir notre billet publié cet été ?
François : La passion des supporters lensois dure et dure encore depuis des décennies. Il n’empêche que je continue à être bluffé par cette ferveur. Même quand l’équipe galère comme c’est le cas actuellement, les fans ne se lassent pas et continuent à remplir Bollaert. C’est plus compliqué à Valenciennes où quand les résultats ne suivent plus, il ne reste que les fidèles. A Lens, le noyau dur est beaucoup plus important grâce notamment aux titres remportés à la fin des années 90 avec les épopées européennes qui ont suivi. Ca a permis de développer un engouement populaire qui ne se dément pas 20 ans après. C’est un cas unique en France. Seul Saint-Etienne est comparable en terme de ferveur en France. Vous mettez l’OM en L2, ils ne remplissent pas le Vélodrome. Non, vraiment c’est épatant. On verra si ça durera mais force est de constater que ça reste le cas depuis le début des ennuis du clubs en 2008.
BM : Justement, à propos de ces emmerdes qui nous collent depuis presque dix ans, est-ce que tu vois une issue à court-terme ?
François : Sportivement, on peut déjà dire qu’Antoine Kombouaré a raté son recrutement. Hormis Autret, le coach, seul à la barre du recrutement cet été, n’a recruté que des joueurs moyens. En terme de jeu, on s’ennuie sauf peut-être à Brest lundi dernier. En termes de classement et de points, c’est catastrophique avec aucune victoire en 7 matchs. Après, la saison est encore longue et Lens a encore le temps de relever la tête. Le derby peut être un déclic pour les Sang et Or. Par contre, il ne faut pas rêver. Malgré son statut de plus gros budget de L2, le club ne montera pas en L1 cette saison. Il y a encore trop de manques. Vu la situation, il va falloir déjà penser à se maintenir.
Quant aux histoires en coulisses, c’est tellement compliqué. Il y a eu énormémént de rebondissement ces derniers mois avec la saga Mammadov qu’on ne peut plus jurer de rien. Lens a juste la chance d’être énormément soutenu politiquement vu ce qu’il représente dans le bassin minier. On ne peut pas laisser couler le Racing. Mais si Lens s’appelait Luzenac, il serait en National depuis bien longtemps…
Un grand merci à François pour sa participation.
Ecrit par Louis de Finesse (@Louis2Finesse)
Dernières confrontations Valenciennes FC – RC Lens

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