Le Rebound Club de Lens se base sur le fait que l’espoir ne s’en va jamais. Le Rebound Club de Lens, c’était le titre que j’avais choisi avant que LaPoch, directrice des titres BM, ne me propose cet exceptionnel Hope is not Gone. Encore et toujours, Lens tombe, mais rebondit. Lens chute, mais se relève. Lens prend des buts, mais ne lâche jamais l’affaire. Lens perd 3-0, mais continue de donner chaud à son adversaire. Lens a décidé de jouer tout le temps, s’en tapant le boutonneux de qui se trouve en face. T’es plus fort, mais tu ne me fais pas peur. Franck Haise personnifie totalement cet état d’esprit. Ce culot. Cette audace. Cette force mentale. Quand le coach lensois te regarde par l’intermédiaire des caméras de Hugo Georgel et Fabien Simon, il t’adresse un message droit dans les yeux, sans tricher, ni mentir une seconde : « qu’on gagne ou qu’on perde, on va y aller fort, très fort ». Et c’est toute la commu lensoise qui soupire « c’est un putain de kiffe ».
Contre Lyon, une fois encore, Lens aura été inégal. D’abord dépassés par le talent de Paqueta, puis dominateurs, lorsque le maestro carioca aura baissé de rythme. De quoi avoir des regrets ? Impossible à dire. La science fiction footballistique, on la laissera aux Asimov du ballon rond. L’injection d’adrénaline m’a suffi. Oui, je fais partie des gens qui aiment vibrer plus que compter les points avant d’aller me coucher. Le RC Lens m’a excité mercredi soir, dans l’attitude, dans sa capacité à ne jamais lâcher l’affaire, et dans son obstination à proposer un football propre et audacieux.
Lens, ce jeune prépubère qui entre en 6e et s’en va danser collé-serré avec les bombasses du bahut devant les caïds de 3e, et ce dès la première soirée à laquelle il est convié. Fier de notre duvet et de nos chtars acnéiques, on s’en tape de ce que pensent les BG de la cour de récré. L’année prochaine, quand le roaccutane aura fait son effet, on sera les plus beaux du préau. Et toutes les chicas du collège nous regarderont. Les autres auront le seum. Ils vont tous nous envier notre style. Ils ne le savent pas encore, mais c’est déjà un peu le cas.
L’audace donc, et forcément la persévérance. Se prendre des recales, ça n’affecte en rien notre volonté. Après la défaite de Lyon, un mot d’ordre, une conclusion : Hope is not Gone. On va réussir car on a ce que peu d’autres ont ; l’art du rebond. Aux côtés des Dikembe Mutombo, David Robinson, Ben Wallace ou autres Rudy Gobert, le RC Lens. Car ce n’est pas la première fois que la team à Francky rebondit après une défaite. Ici, on parlera d’une défaite dans la défaite (jusqu’au 3-0) et d’une victoire dans la défaite (à partir du 3-1). Les rebonds précédents suivaient eux-aussi des matchs perdus. Brest par exemple, mais aussi Monaco, ou Rennes un peu plus tôt. La fin de match contre Lyon, c’est un rail de confiance pour la suite du championnat. Un indice que Lens ne sera certainement pas qu’un éphémère tube du premier semestre, mais un vrai cavalier hurleur dont l’armure est prête à encaisser les coups les plus durs, du heaume à la cubitière. Avant de frapper cette foutue Ligue 1.
PREMIÈRE MI-TEMPS
On ne peut pas dire que le match démarre de la manière la plus sereine. Dès la sixième minute, Paqueta transperce un bloc défensif lensois mal aligné en adressant une passe laser à Maxwell Cornet. Poteau rasé. Dans la foulée, Clauss intercepte une passe latérale lyonnaise pour aller chatouiller Anthony Lopes. Lyon domine, Lens répond, mais Lyon domine.
Arrive la vingtième minute de jeu, et la bombe Boura adresse un corner coquin. Badé, qui en plus de savoir défendre, relancer, dribbler, se dépatouille du marquage un peu lâche de Diomandé pour reprendre le ballon d’une volée d’inspiration zlatanesque (c’est dans le dico) qui frôle la lulu de Lolo. Plus 10M€ sur la valeur marchande.
Mais Lyon ne desserre pas l’étreinte. Paqueta est la lumière que le milieu de terrain lyonnais attend depuis tant d’années. Physiquement robuste, techniquement sûr, tactiquement au point, le brésilien est le relais de chaque offensive des Gones. Vingt-troisième minute, Aouar est touché, Leca est couché. La frappe est repoussée par le portier corse, en réussite jusque-là. Hum hum.
Trente-septième minute, Memphis trouve Paqueta, qui joue directement sur Kadewere, le zimbabwéen dévie subtilement pour le seul rappeur valable du 69, qui s’en va terminer l’action avec calme. Lyon ouvre la marque. Haise gueule sur sa défense, beaucoup trop verte dans le placement, surtout sur ces terres lyonnaises (1-0).
La mi-temps est sifflée, Lyon est au dessus. Mais les espoirs sont encore permis.
SECONDE MI-TEMPS
A la reprise, on se dit que le match est loin d’être fini. OK les lyonnais nous ont globalement maîtrisés, mais les circuits de passes lensois étaient aussi intéressants qu’imprécis. Comme souvent, il ne manque pas grand chose pour que la formidable machine se mette en route. On soulève donc l’opercule de ce deuxième act… PUTAAAAAAAAAAAAAAAIN JEAN-LOUIS !
But gag, dès le retour des vestiaires. Comme au chenil, Lens se saborde tout seul. Sur un centre certes précis de Dubois, Leca boxe la balle sur le genou du malheureux Fortes. Le ballon finit au fond des filets (2-0). On espère quoi, désormais ? Le grain de sable ayant covidé la mécanique lensoise. Sur un nouveau ballon touché par Paqueta, Steven Fortes dévie maladroitement la trajectoire du ballon qui arrive dans les pieds de Kadewere. Celui qui nous a mis tellement de misères en L2 continue à prendre son pied en nous martyrisant. Leca prendra également le pied du Zimbabwéen. Penalty. Memphis exécute. J’EN AI MARRE !
On joue donc la cinquantième minute. Et on est menés (3-zéro). Trois minutes plus tard, Lyon relance une hostilité. J’ai presque envie de toute lâcher, pour mater la prise de Washington par Jamiroquai en direct sur BFM. On joue à ce moment-là en paréo, et Kadewere déboule de nouveau dans son demi-espace droit. Le face à face avec Jean-Louis s’annonce terrible. Je me cache derrière le coussin de mon canapé, terrifié. Mais on n’abat pas un Corse aussi facilement. Leca sort la parade, le score est toujours large, mais un peu moins qu’il aurait pu être.
Dans la minute qui suit, Lens tente de sortir la tête de l’eau. Repartir de l’avant. C’est le mot d’ordre. La philosophie centrale du jeu lensois. Kakuta mène le jeu, et se retrouve aux trente mètres, puis décale astucieusement pour Fofana, qui laisse passer le ballon en mode feinte de corps pour Sotoca. L’enchaînement qui suit est somptueux. Trois touches de balle, une intérieure, deux extérieures, et une frappe sublime de l’intérieur du pied droit qui vient nettoyer la lucarne de Lopes. Le « compte à rebond » est déclenché (3-1).
Lyon continue d’attaquer, Lens n’étant pas encore tout à fait entré dans les têtes d’en face. Et pourtant, la pression du bloc rhodanien est de moins en moins intense. Paqueta baisse d’un ton, Memphis est en mode fureteur, cherchant la faille à lui tout seul. Le bloc Sang et Or monte d’un cran. Fofana et Doucouré font un putsch au milieu de terrain. Le reste de l’équipe suit la dynamique. Lens domine, et finit même par marcher sur son adversaire.
Quatre-vingt-huitième minute, Badé prend le dessus sur son adversaire, et envoie une tête monstrueuse vers l’avant. Kalimuendo s’empare du ballon, et s’en va provoquer De Sciglio. Le futur-ex-futur parisien contrôle le défenseur italien, avant de littéralement le dribbler, puis le bousculer. Zéro respect. Dix-neuf piges et déjà une énorme confiance. La passe en retrait d’Arnaud trouve un Doucouré enfin inspiré dans sa frappe de balle. Le pétard est tel que les mains et les deux cubitus de Lopes n’auront pas suffi pour dévier la trajectoire du premier missile sol-air malien de l’histoire (3-2).
Lens est revenu fort, très fort. Et c’était beau. Magnifique même. L’art du rebond, de l’abnégation, spécialités lensoise cette saison, et qui sera encore mise à contribution samedi soir pour la réception d’un RC Strasbourg qui revient fort, très fort également.
Écrit par L2F
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